Votre enfant mangeait de tout ou presque et refuse subitement pleins d’aliments ou de gouter aux nouveaux plats ? La peur de gouter des aliments nouveaux peut être un signe que votre enfant rentre dans une phase de néophobie alimentaire. Cette période est normale et ne doit pas être associée au trouble de l’alimentation pédiatrique, elle fait partie du développement de l’enfant. Si tous les enfants ne passent pas par-là, il est important de comprendre ce qu’il se passe et de voir les solutions que les parents peuvent mettre en place. Car oui il y a des solutions.
1. Rappel sur la diversification alimentaire :
· Entre 4 et 6 mois : les dernières études recommandent l’introduction de la diversification alimentaire à cet âge : des purées avec introduction des allergènes : Œuf, lait, poissons, crustacés, mollusques, gluten, soja, moutarde, céleri, arachide, fruits à coques, sésame, lupin, anhydre sulfite….
Il s’agit ici de découverte et pas de nourrir votre bébé : on est sur des petites quantités : et concernant les allergènes, on ne les expose pas qu’une fois, il faut poursuivre l’exposition dans le temps pour garder une tolérance.
· A partir de 6 mois : la diversification alimentaire de votre bébé se poursuit avec l’introduction des morceaux en fonction du tonus, de l’âge de début alimentation (2 mois après le début), de l’appétence de l’enfant, de ses capacités en motricité fine…
On fait attention aux aliments à risque d’étouffement : tomate cerise, olive, noix, …
C’est à partir de 6 mois qu’on peut mettre en place la DME (diversification Menée par l’Enfant)
· Entre 6 et 12 mois : progressivement l’alimentation doit tendre vers celle d’un adulte en texture : toutes les textures doivent être présentées ainsi qu’un panel d’aliments très large.
Par exemple la carotte sera présentée en purée, en bâtonnets, en rondelle, râpée, en gratin, en sauce…
Le lait reste primordial (entre 500ml minimum et 750ml/jour environ)ou allaitement à la demande poursuivi
· vers 18 mois- 2 ans : l’enfant commence à refuser certains choses et plus encore les aliments nouveaux. C’est le début de la période de la néophobie alimentaire. Ce n’est pas un trouble du développement chez l’enfant mais une phase dans son développement.
2. La néophobie alimentaire ? Mais qu’est-ce que c’est ?
On peut la définir ainsi : Il s’agit d’une réticence ou d’un refus d’aliments nouveaux. Cela arrive à un stade où l’enfant s’individualise. On retrouve ce comportement chez certains animaux à l’âge où ils apprennent à manger seul. C’est donc un réflexe de survie et non pas un caprice, ou un acte réalisé consciemment pour embêter les parents et rendre le temps du repas compliqué.
La néophobie se manifeste aussi par une certaine sélectivité : c’est une réponse soudain négative face à des aliments acceptés avant avec un réduction du panel alimentaire (principalement : légumes, fruits, poissons) alors que les aliments à forte source calorique, certaines viandes et les aliments sucrés restent appréciés. L’enfant est attiré par les aliments doux et denses et refuse les aliments forts et peu caloriques.
Si la néophobie alimentaire peut débuter vers 18 mois et elle se manifeste principalement entre 2 et 6 ans. On constate me plus souvent un pic puis elle s’atténue progressivement ainsi que la sélectivité. Environ les ¾ des enfants sont concernés par la néophobie mais a des dégrés différentes ; on en distingue 3 :
· Le stade 0 : pas de néophobie : l’enfant demande à goûter avant de consommer ou non le plat,
· Néophobie dite flexible : il accepte de goûter sous la contrainte, mais sans modifier son point de vue initial : il y a une réticence mais après exploration de l’aliment : il goute
· Néophobie rigide : il refuse catégoriquement de goûter des produits nouveaux : le refus ou la phobie est total
Il ne faut pas confondre avec l’hyper sélectivité alimentaire (ou picky eating ou trouble oralité) qui relève du trouble et qui est là depuis le début de la diversification alimentaire.
Voici quelques exemples de comportements illustrant la néophobie alimentaire
· Le tri des aliments mélangés
· Les grimaces devant une assiette
· Faire tourner les aliments dans tous les sens dans son assiette, sans les porter à la bouche
· Le refus de gouter un aliment qu’il mangeait jusqu’à maintenant sans problème
· Le refus de gouter un aliment nouveau
· Examiner sous toutes ses coutures un aliment
· Recracher
· Repousser l’assiette ou la cuillère
· Sentir l’aliment
· Détourner la tête
3. Peut-on prévenir la néophobie alimentaire ?
Oui on peut prévenir la néophobie via différentes actions.
· Mettre en place une alimentation très diversifiée in utero chez la future maman
· L’allaitement permet à l’enfant de découvrir via le lait maternel une palette de goûts plus variée que les biberons dont le goût du lait reste inchangé pendant plusieurs mois.
· Exposition le bébé dès le début de la diversification a beaucoup d’aliments différents et de textures. La DME est un bon moyen de présenter les aliments très tôt sous pleins de formes différentes. Vous pouvez retrouver ici des idées de recettes.
· Ne pas lâcher juste après un refus d’un aliment. On essaie d’autres formes, dans d’autres plats… Entre 7 et 20 expositions pour être sûr qu’on n’aime pas : les papilles gustatives ont besoin de se former.
4. Quelles sont les solutions à mettre en place pour rendre les repas plus simples ?
Si on connait les causes, on sait aussi qu’il ne faut pas baisser les bras, qu’il n’y a pas de fatalité et que des solutions existent :
· On propose de goûter mais on ne force jamais. Goûter veut dire une toute petite partie (même si c’est la taille d’un grain de riz c’est ok)
· On laisse l’enfant jouer et explorer sensoriellement la nourriture. Cela va à l’encontre des règles souvent établies à table mais l’enfant en a besoin pour approcher la nourriture autrement que par la bouche. N’ayez pas peur que votre enfant ne sache pas se tenir correctement à table à l’âge adulte : il a le temps d’apprendre et il vous observe : donc il apprend aussi même si il n’applique pas dans l’instant.
· L’enfant adore imiter le parent : un parent qui ne goûte jamais de nouvelles choses, qui n’est pas curieux à table montre cet exemple à l’enfant. Vous ne mangez pas de légumes pourquoi l’enfant devrait-il le faire ?
· Ajouter du nouveau parmi du familier. Une assiette avec que de la nouveauté effraie plus qu’une assiette avec juste une nouvelle chose. On peut mettre une toute petite quantité d’un légume qu’il refuse parmi une assiette avec des aliments copains pour lui par exemple.
· Faire participer aux courses et au repas : l’enfant peut toucher les aliments à ce moment-là sans qu’il y ait la pression de devoir le manger après.
· Aller visiter une ferme pour comprendre d’où viennent les aliments (maraicher par exemple) ou faire pousser des graines / potager
· Pas de menace ni de récompenses ou de félicitations quand il fini son assiette.
· Favoriser les repas sans écrans afin que l’attention de l’enfant soit portée sur ce qui il y a dans son assiette
· Réussir à lâcher prise : pas simple car un de nos rôles principaux en tant que parent est de nourrir notre enfant. Un enfant qui ne mange pas est source de stress très important : mais un enfant qui sent le stress du parent ne mangera pas mieux bien au contraire.
· Garder des repas sans commentaires sur la quantité mangée, ne pas prendre personnellement le refus de manger (le repas est bon, on n’est pas forcement mauvaise cuisinière), la néophobie est une période.
· On ne parle pas de ce problème devant lui avec autrui…
· On ne compense pas les aliments non mangés par d’autres. Plus on s’adapte plus l’enfant devient sélectif.
· On n’oblige pas à finir son assiette ou un plat de légume car on a peur qu’il manque
· Développer le langage et le vocabulaire pour changer du « j’aime pas » : acide sucré, amer… ça pique, ça croustille, c’est mou, c’est chaud…je ne connais pas…
Si vous avez peur pour sa santé, que vous trouvez que le panel d’aliments est vraiment restreint, les quantités minimes, que le comportement de l’enfant change (moins toniques…) n’hésitez pas à rencontrer un professionnel de santé qui saura faire un bilan diététique. Les diététiciens sont formés aux troubles alimentaires seront les plus à même de vous donner des conseils diététiques adaptés à votre enfant. Cela permettra de mettre en place une supplémentation si besoin et de trouver des conseils et astuces personnalisés à votre situation.
L’important est de garder du plaisir dans les repas, il faut y aller par étapes et surtout ne pas se décourager face à une réponse négative de votre enfant. Les enfants adorent jouer, aller sur ce terrain et il gardera malgré ses refus de gouter de la nourriture nouvelle un plaisir à partager ses repas avec vous et cela passera beaucoup plus vite que si une tension continuelle s’installe.